La Conférence de La Haye de droit international privé poursuit ses travaux de réglementation internationale de la GPA. Le groupe de travail consacré à ce « projet législatif » se réunit à nouveau, du 12 au 16 octobre 2020. L’organisation se défend de prendre parti pour ou contre la pratique, tout en affirmant que puisque celle-ci existe, il faudrait en réglementer les conséquences liées aux « conventions de maternité de substitution à caractère international ».
Par cette position, la Conférence de La Haye reconnaît de facto l’acceptabilité de la maternité de substitution. Plus encore, elle légitime et renforce le marché mondial de fabrication d’enfants, généré par cette pratique. Affirmer que la seule solution serait de la réglementer au niveau international, consiste à faire croire que la simple existence d’une pratique la rend inéluctable, que l’inéluctable veut dire acceptable, et que l’acceptation nécessite une réglementation.
Ce raisonnement est pernicieux et aussi faible que faux. On ne réglemente que parce qu’on adhère, sur le fond, à ce qu’est une pratique. Par exemple, l’esclavage existe, et perdure, malgré son abolition et son interdiction. Néanmoins, personne ne pense à le réglementer, le considérant comme inéluctable. Le même raisonnement est valable pour la traite, ou encore pour la vente d’enfants, ou pour les violences faites aux femmes. La peine de mort existe, et elle est pratiquée même par des États de droit démocratiques. Aucune organisation internationale ne se mobilise pourtant pour la réglementer au niveaux international. Bien au contraire. Car toutes ces pratiques – l’esclavage, la traite, la vente d’enfants, les violences faites aux femmes, la peine de mort – sont considérées contraires aux droits humains. Et ce n’est pas parce qu’elles existent, que quiconque cherche à les réglementer. Lorsqu’une pratique sociale attaque par sa nature même les droits humains, elle n’est jamais réglementée pour en limiter les dégâts. Elle est combattue et abolie.
La maternité de substitution porte atteinte au principe de dignité humaine, qui est le fondement des droits humains. Elle repose sur des violences médicales, obstétricales, symboliques, économiques et psychologiques faites aux femmes. Elle les instrumentalise et transforme la vie humaine en objet de contrat.
Contrairement à ce que veut faire croire la Conférence de La Haye, pour respecter les droits humains des enfants, il faut tout d’abord les considérer comme des êtres humains, et non pas comme des objets à obtenir par contrat. Respecter les droits humains des femmes, c’est les considérer comme des êtres humains et non pas comme des « gestatrices » .
Réglementer une pratique qui porte atteinte aux droits humains aboutit à affaiblir ces droits. Pour les respecter, la seule solution est l’abolition de telles pratiques.
La CIAMS, coalition internationale d’organisations féministes et en faveur des droits humains, a élaboré un projet de convention internationale pour l’abolition de la maternité de substitution.
Et nous encourageons les États à oser combattre le marché des êtres humains, à oser refuser l’instrumentalisation des femmes – de toutes les femmes, partout dans le monde.
Le courage politique est de ne pas céder à la propagande commerciale de l’industrie mondialisée de la maternité de substitution. Le courage politique est d’agir pour l’égalité entre les femmes et les hommes, et abolir une pratique patriarcale et réactionnaire.
Marie-Josèphe Devillers, Berta 0’Garcia, Ana-Luana Stoicea Deram
co-présidentes de la CIAMS (Coalition Internationale pour l’Abolition de la Maternité de Substitution)
Cette tribune a été publiée par Marianne https://www.marianne.net/agora/tribunes-libres/gpa-reglementer-une-pratique-qui-porte-atteinte-aux-droits-humains-aboutit-a-affaiblir-ces-droits.
Elle a été également reproduite ou déclinée dans les journaux suivants :
Canada :
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